|
LA REVUE MOUTARDE |
|
La revue qui avance comme un train dans la nuit. |
|
N°4 |
|
|
||||||||
|
08-07-2.004
|
||||||||||
|
|
||||||||||
|
|
||||||||||
|
|
La revue Moutarde, toujours soucieuse d’offrir à
ses lecteurs ce qui se faite de mieux en matière de littérature vient de
prendre encore un wagon d’avance à ses concurrents. En effet, nous avons
récemment reçu l’excellente nouvelle que les affaires de propriété
intellectuelle qui s’opposaient à la publication du document qui va suivre venaient
de tomber comme par miracle. Nous avons donc le privilège d’offrir à nos
pugnaces lecteurs un texte aussi rare que précieux. Il s’agit d’une
transcription de la série de conférences prononcées par le professeur Eugène De
La Foi, spécialiste de réputation mondiale de la littérature russe, assisté de
monsieur Jean Collenot, une des gloires montantes du
théâtre français, qui lira magnifiquement les poèmes quand cela sera
nécessaire. Faut-il préciser que cette série de
conférences n’est autre que celle que le professeur avait consacré à Arthur Maïev, alors quasi-inconnu en France et qui jouit depuis de
la célébrité que l’on sait. Nous tenons à remercier Monsieur le Professeur De
La Foi et Monsieur Jean Collenot pour nous avoir
autorisé à publier une transcription de ses textes pour une somme plus que
modique. Enfin, notre reconnaissance va à Monsieur Emmanuel Goudé,
qui eut le bonheur d’assister aux conférences et qui, pressentant qu’il
assistait à une date majeure de la critique littéraire, prit grand soin de se
munir du matériel nécessaire à l’enregistrement. Il a accepté de retranscrire
gracieusement ses enregistrements pour la Revue Moutarde. La publication de
cette admirable série de conférences s’échelonnera sur plusieurs numéros à
raison d’une conférence par numéro. Voici donc la première de ces conférences.
A déguster sans modération…
|
Arthur Maiev (193 ?-1966) Conférence 1 |
Conférence donnée le 23 Mars par Eugène De La Foi,
professeur de Littérature comparée, assiste de Mr. Jean Collenot,
acteur, pour la lecture d’extraits.
Esquisses :
Ce n’est pas avec certitude que l’on positionne la
date de naissance d’Arthur Maiev. Il serait venu au
monde probablement au milieu des années 30 a Budapest (l’administration hongroise
d’alors négligeait assez la tenue des registres de naissance). Sa mort,
survenue dans des conditions mystérieuses (par pendaison à un réverbère de la
perspective Nevsky à Saint Petersbourg)
peut néanmoins être datée précisément. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
Les premiers poèmes de Maiev,
aux alentours de sa quatorzième année font état d’un romantisme exacerbé :
pessimisme bon marché et procédés d’écriture simplistes en sont les principaux
traits.
Je contemplais les cieux
J’oubliais la ville
Sur une mélodie gracile
(Carnets 1)
La chair et sa carnation olivâtre,
Burinée, râpeuse, violacée…
Je voulais la voir pourrir dans l âtre,
Qui, d un bûcher, l’aurait enlacée…
(Carnets 3)
Les recherches effectuées sur ses jeunes années budapestoises ont permis de définir un emploi du temps
relativement satisfaisant sur une période de 3 ans. Tout d abord, l’incident
reste fameux : le jeune Arthur
(approximativement 12 ans) découvre les œuvres de Rimbaud dans la
bibliothèque familiale. Il se prends alors de passion pour la poésie et dévore
le reste des ouvrages. Autrefois, lorsque son père était encore présent au
foyer, la lecture des livres de la grande bibliothèque lui était défendue, ce
qui a sans doute contribue à exciter la curiosité du petit Arthur.
Je n ai jamais – à proprement parler – repensé à ce
moment…ce moment où, petit garçon j’ai saisi Une Saison en enfer…pourquoi celui la ? A cause de notre prénom commun sans
doute ? Ce fut ma première relation charnelle avec un livre…et quelque
chose de magique me fut transmis par ces figures encrées, ces points, ces
courbes, ces traits…
(Journal – année 1949)
Son père parti, il lui a fallu trouver un métier
rapidement afin de subvenir aux dépenses que sa mère ne pouvait plus contenir.
Il lui a fallu aussi vendre le lot de livres familial, véritable trésor ayant
appartenu a son père, alors disparu. C’est ainsi qu’il apprit a écrire et à
rédiger à une prodigieuse allure, car il recopia tous les livres (plus de 80)
qu’il lui fallait vendre peu de temps après. Cette obsession de la sauvegarde
d’un moment fugitif, cette terreur du tempus
fugit ne le quittera plus (il aura même le toupet
de demander - après s’être séparé - à sa
première fiancée les lettres qu’il lui envoya jadis). Mais laissez moi vous
parler un peu de son père, personnage fantasque s’il en est.
Dragan Maiev.
D’origine russe, Dragan Maiev fraya dans ses jeunes années avec les dissidents du
communisme. Ses compagnons constituaient une frange réduite d’aristocrates
déchus traînant en plus dans leurs sillages d’anciens valets et subalternes des
tsars, tous ceux, pour ainsi dire qui avaient pu échapper a la terrible
répression encore toute récente. Il apprit à vivre dans les bas-fonds de la
clandestinité, à quémander et à voler. Considéré par les services de
renseignement comme un inoffensif traîne-savate, il franchit une autre étape en
participant à la mise à sac d’un orphelinat de Smolensk. Il justifiât l’attaque
en expliquant poliment aux policiers que les orphelins étaient les rejetons du
Malin, qu’il avait vu leurs vrais visages en rêves la veille et qu’il s’était
procuré un fouet a traîneaux de loups dans le but de ‘tanner la couenne de ces
vils pourceaux’. Il sera libéré peu de temps après avec l’injonction de quitter
le pays séance tenante.
(A suivre)